Suj : paroles
Date : 09/11/99 20:58:28
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J'hésite à vous le dire parce que vous pourriez en déduire que je suis
vieux.
Tant pis, je me décide tout de même à courir ce risque.
 
Depuis trois années, je retrouve deux fois par an mes anciens camarades
de l'école primaire que je n'avais pas revus depuis soixante-cinq années.
Je suis frappé par le fait que, chez certains, les mêmes choses
reviennent à chaque fois dans les conversations :
un échec "anormal" à un examen, une vexation,
une injuste accusation, une sanction imméritée...
autant de blessures non encore cicatrisées
malgré le nombre élevé des années.
Et pourtant, ils ont connu des existences chahutées.
(guerre, résistance, déportation).
 
Moi, je n'ai pas besoin de parler du traumatisme de ma douzième année
parce que je l'ai écrit. Et, peu à peu, lors des réécritures pour la mise
au point de mon texte, je m'apercevais que le passage douloureux était
de plus en plus facile à franchir.Et la méticuleuse vérification
typographique finale
a presque achevé de le mettre à distance..
Depuis, la prise en charge du texte par plusieurs lecteurs a déjà commencé
à solubiliser ce souvenir dans l'air du temps.
J'aurais dû l'écrire beaucoup plus tôt au lieu de le laisser si longtemps
en arrière-fond de la gorge.
 
Alors,je comprends l'intervention des psychologues à la suite d'une
catastrophe.
Ils aident à mettre des mots sur le drame pour que puisse commencer
le travail du deuil, c'est-à-dire le réinvestissement, le départ
pour une nouvelle construction de vie.
 
Les enfants d'aujourd'hui vivent beaucoup de situations difficiles
ressenties parfois à leur niveau comme des catastrophes.
Alors, qu'ils les parlent plus ou moins symboliquement, qu'ils les écrivent,
les modèlent, les manipulent, les peignent, les jouent, les mathent...!!!
(sans que pesrsonne ne s'en mêle.)
Ils pourront alors affronter sereinement la connaissance.
Paul Le Bohec
 
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Suj : écriture
Date : 11/02/00 19:46:44
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Mais que se serait-il passé si Michel Barrios n'avait relancé
le mot dextrose,
J'aurais rapporté ces informations de publications à ma femme
que ça intéresse, à ma fille déjà plus lointaine
et à mon petit-fils qui s'en fout complètement.
A défaut, je l'aurais dit à leur chien qui m'accepte silencieusement
et même au petit chat qui ne sait même pas que j'existe.
Pourquoi , parce que l'être humain est ainsi fait que lorsqu'il
a été percuté, il a besoin de répercuter pour retrouver son équilibre.
Ou, si l'on préfère, ce que la vie imprime en vous, on a besoin de
l'exprimer.
 
Je ne parle pas pour moi, évidemment, mais pour les enfants d'aujourd'hui
qui subissent tant de percussions;
Comment pourraient-ils retrouver un équilibre ?
Peu de chances que ce soit par l'écrivance (compte-rendus, rapports,
constats)
mais plutôt par l'écriture qui utilise autrement les mots ;
comme Francis qui parlait de chocolat et de charbon
sans même savoir ce que cela recouvrait; (Le texte libre...libre).
Il y a aussi le dessin qui permet d'être encore moins repérable.
-car il y a risque à se faire entendre en clair ; l'environnement
pouvant vous faire rentrer vos propres paroles dans la gorge.-
Il y a évidemment d'autres solutions intéressantes.
Mais aussi, le chahut, la délinquance, la violence...
A l'école, quelles sont les priorités ?
 
Paul.
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Suj : FREINET: chrysanthèmes
Date : 17/03/00 20:11:21
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Lorsqu'on écrit pour être publié, c'est souvent pour paraître.
Mais on peut aussi écrire pour être. Il y faut de la liberté.
Où est la liberté du texte quand on doit le produire avant une date butoir
et sur un thème fourni par un autre que soi-même ?
Voici trois textes sur l'hôpital :
 
LE CHIOT MAGIQUE.
 
"Il était une fois un jeune couple qui voulait un petit chiot.
Alors, ils eurent un petit chiot tout blanc
avec huit petits points noirs sur le dos.
Mais il n'était pas comme les autres : il scintillait de partout
et son aboiement faisait miaou, miaou !
- Nous allons le faire regarder par le médecin du pays.
Le médecin dit :- Mais il n'a rien du tout !
En rentrant chez eux les parents virent que c'était vrai
et ils furent contents."
Vincent ( 8 ans).
 
Texte écrit le lendemain du retour de l'hôpital où Vincent
avait été opéré d'un strabisme divergent.
"Il n'avait rien du tout."
 
L'OLIVIER.
 
3Les oliviers sont beaux en toute saison.
Les oliviers donnent des olives.
Un jour, un olivier donna des cerises.
Et il devint tout rouge.
Les gens disaient qu'il était malade.
Et ce pauvre olivier mourut avec autour de lui
le chant des oiseaux de bonheur."
Nathalie (7 ans)
 
Le petit frère s'appelle Olivier.
 
LES PETITS CHIENS.
"Les chiens vont dans la crèche. Ils dorment.
Les malheureux petits chiens trop, trop blessés.
Alors les petits chiens sont morts.
Le chasseur les a blessés sans le faire exprès.
Il a tiré dedans.
Et longtemps, longtemps le monde a pleuré :
les oiseaux, les arbres, les branches, le soleil,
les hérons, les rosiers.
PHILIPPE ( 8 ans).
 
Un mois auparavant, sa mère s'était suicidée au fusil de chasse..
 
Ce sont des textes libres rédigés sans souci du temps,
à leur heure. Et écrits sans thèmes.
 
Paul Le Bohec.
 
Paul Le Bohec
ICEM Pédagogie Freinet
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